Le dernier désir
j'ai couvert de miracles une terre infertile
j'ai fait boire mon sang aux arbres immobiles
et la sève qui coule entre leurs branches noires
abreuve en même temps les veines de ma mémoire
déjà je me lasse de ces rimes trop pauvres
de ces vers pathétiques dont le cou s'est tordu
et dont les pieds s'emmèlent à ne savoir danser
qu'aux mêmes airs trainants de rimes parsemés
et la lune je le sais pâlit quand elle me voit
j'ai au visage toujours le masque de l'oubli
le regard-crépuscule de ceux qui n'ont rien dit
mais dont les yeux suffisent à provoquer l'effroi
aurions-nous eu des heures à perdre
j'aurais peint sur la soie ton tout premier sourire
aurions-nous eu des souvenirs
je donnerais un nom à ton spectre
et tu prendrais peut-être une forme nouvelle
les astres t'offriraient des reflets d'aquarelle
tu aurais le regard-aurore de ceux qui ont tout dit
et dont les yeux suffisent à redonner l'envie